Delacroix 2018

De la réalité au rêve, un dessinateur d’exception, Eugène Delacroix Arlette Sérullaz ENGLISH VERSION ON PAGE 11 “Delacroix attachait, & non sans raison, le plus haut prix à ses cartons; il ne les ouvrait que pour ses élèves ou pour ses amis les plus intimes. Il ne les a jamais vidés pour en tirer profit. Il voulait qu’après sa mort ils vinssent comme un argument solennel protester contre les reproches incessants d’improvisation & de facilité qu’on lui adressait, & prouver qu’une facilité semblable à exprimer l’idée sans le secours préalable de l’étude la plus persistante eût été un phénomène sans exemple dans l’histoire de l’art” souligne Philippe Burty dans sa préface au catalogue de la vente de l’atelier Delacroix qui se tint à Paris, à l’Hôtel Drouot, du 17 au 27 février 1864. 1 En exigeant pareille dispersion en vente publique, Delacroix avait vu juste. Chargé de mettre définitivement en ordre à cet effet les dessins, pastels et aquarelles (environ six mille) de son ami, Burty fut certainement impressionné par la sidération de celles et de ceux accourus dès le premier jour précédant la vente. Le critique Théophile Silvestre, présent lui-aussi, observa avec émerveillement la ruée de cette foule: “( . . . ) Une atmosphère d’étuve de rhumes et de fluxions de poitrines n’a effrayé ni hommes, ni femmes ( . . . ) En quatre heures, pas une âme sortie; impossible, d’ailleurs: les salles adjacentes et les corridors latéraux étaient comble.” Au soir du 22 février, ayant suivi attentivement les premières enchères sur les dessins, Silvestre devait ajouter: “Ce qui a vraiment étonné tout le monde à cette vente publique des aquarelles, des dessins et des griffonnements de Delacroix, c’est l’inépuisable abondance du maître, la variété de ses motifs et l’acharnement qu’il mettait à rendre sous toutes ses formes les sujets dont il avait été frappé. On reconnaît bien là l’homme qui produisait sans cesse pour soulager son esprit et son cœur, et qui avait condamné sa main à une escrime perpétuelle.” 2

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